PAROLE D'EXPERT
Exploitation minière en Afrique : un modèle économique à repenser, selon Dr Ahamadou Mohamed Maïga

Dans une réflexion publiée, le Dr Ahamadou Mohamed Maïga, juriste minier malien et consultant de renom, dresse un constat sans concession : « Les compagnies minières ne sont pas là pour les beaux yeux des Africains. » Cette déclaration percutante met en lumière les déséquilibres persistants dans l’exploitation des ressources minérales africaines, un secteur clé pour de nombreuses économies du continent. Alors que l’Afrique regorge de minerais stratégiques (or, cuivre, cobalt, terres rares) les bénéfices tirés par les populations locales restent souvent dérisoires.
Le Dr Maïga, fort de son expérience en tant que consultant pour la Banque mondiale et l’Union africaine, pointe du doigt un modèle économique désuet. Les compagnies minières étrangères, principalement originaires d’Australie, du Canada ou de Chine, dominent l’exploitation des ressources africaines. En 2024, des géants comme BHP, Glencore et China Molybdenum ont renforcé leur présence, notamment en République démocratique du Congo (RDC) et au Ghana, où ils contrôlent des projets de cuivre, cobalt et or. Pourtant, les retombées économiques pour les États et les communautés locales sont limitées.
« Les contrats miniers sont souvent déséquilibrés, favorisant les intérêts des investisseurs étrangers au détriment des pays hôtes », explique Maïga. Les mécanismes de transfert de profits et d’évasion fiscale, fréquemment évoqués dans les rapports sur le secteur, privent les gouvernements africains de milliards de dollars chaque année. Au Nigeria, par exemple, le contrôle exclusif du gouvernement fédéral sur les ressources minières n’a pas empêché une mauvaise gestion, tandis qu’au Mali, la suspension des permis miniers depuis 2022 vise à assainir un secteur gangréné par des pratiques opaques.
Au-delà des enjeux économiques, l’exploitation minière soulève des questions sociales et environnementales graves. En RDC, un récent rapport a dénoncé des expulsions forcées orchestrées par des compagnies minières, souvent avec la complicité d’autorités locales, violant les droits des populations. Les femmes, en particulier, souffrent d’un manque d’accès aux opportunités économiques dans les zones minières, malgré des appels à des politiques plus inclusives.
Sur le plan environnemental, les dégâts causés par l’extraction intensive (déforestation, pollution des eaux, érosion des sols) compromettent la durabilité des écosystèmes. Le Dr Maïga insiste sur la nécessité d’intégrer des études d’impact environnemental rigoureuses dans les processus d’attribution des permis miniers, une pratique qu’il a lui-même promue au Mali.
Face à ce constat, Maïga appelle à une refonte des cadres juridiques et contractuels. Il prône une approche qui renforce la souveraineté des États africains sur leurs ressources, à l’image des réformes entreprises au Burkina Faso, où le gouvernement cherche à nationaliser davantage ses mines d’or. La création de cadres régionascopy, comme l’Atlas des législations minières africaines, vise à rendre ces informations accessibles au public.
Le juriste malien plaide également pour une meilleure transparence dans la gestion des revenus miniers. Son travail avec des organisations comme Publish What You Pay a contribué à établir des mécanismes de plaidoyer pour la mise en œuvre de la Vision minière africaine, un cadre adopté par l’Union africaine pour maximiser les bénéfices des ressources pour les populations.
Le Dr Maïga conclut par un message clair : les pays africains doivent négocier des contrats plus équitables, renforcer leurs capacités juridiques et investir dans la transformation locale des minerais. « L’Afrique ne peut plus se contenter d’être un simple fournisseur de matières premières », affirme-t-il. Des initiatives comme le projet Ngualla en Tanzanie ou Phalaborwa en Afrique du Sud, qui visent à produire des terres rares localement, montrent la voie à suivre.
Alors que la demande mondiale pour les minerais critiques explose, portée par la transition énergétique et les technologies vertes, l’Afrique a une opportunité unique de repenser son modèle minier. Reste à savoir si les gouvernements sauront relever ce défi pour transformer leurs richesses souterraines en développement durable pour leurs populations.
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