Depuis son arrivée au pouvoir en août 2020, le général Assimi Goïta, président de la transition malienne, a fait de la souveraineté économique une priorité absolue. Au cœur de cette ambition se trouve le secteur minier, dominé par l’or, qui représente une manne financière cruciale pour le Mali. Avec l’adoption du nouveau code minier en août 2023, le président Goïta a mis en place une stratégie audacieuse pour reprendre le contrôle des ressources nationales, s’appuyant sur une équipe restreinte de techniciens et de fidèles.
Le Mali est le troisième producteur d’or en Afrique, avec une production annuelle d’environ 73,9 tonnes en 2024, selon le ministère des Mines. Ce secteur, qui contribue à 25 % du PIB et 75 % des exportations, a longtemps été dominé par des multinationales étrangères comme Barrick Gold (Canada) et Resolute Mining (Australie). Cependant, sous l’impulsion du président Assimi Goïta, le nouveau code minier de 2023 vise à rééquilibrer les bénéfices en faveur de l’État malien. Parmi les mesures phares :
- Augmentation de la part de l’État : La participation de l’État dans les projets miniers passe de 20 % à 35 %, avec une option pour acquérir 10 % supplémentaires.
- Taxation accrue : Les entreprises doivent s’acquitter de nouvelles taxes et régler les arriérés fiscaux, sous peine de sanctions sévères.
- Nationalisation ciblée : Les mines de Morila et Yatéla sont désormais entièrement sous contrôle de l’État, marquant une étape majeure vers la souveraineté économique.
- Audit du secteur : Un audit commandé par Goïta a révélé des irrégularités dans les contrats miniers, justifiant des renégociations musclées.
Cette réforme s’inscrit dans une vision souverainiste plus large, visant à réduire la dépendance aux partenaires étrangers et à maximiser les revenus pour le développement national. En janvier 2025, le ministre des Finances, Alousséni Sanou, annonçait que les recettes minières pourraient tripler d’ici la fin de l’année, citant un versement de 20 milliards de FCFA (30,5 millions d’euros) par un opérateur minier comme exemple.
Pour mettre en œuvre cette stratégie, le président Goïta s’appuie sur une équipe resserrée de techniciens et de fidèles, souvent issus de l’armée ou de milieux proches du pouvoir. Selon Jeune Afrique, cette « task force » est le moteur de la politique minière souverainiste. Parmi les figures clés :
- Mamou Touré, le stratège : Ancien cadre de Randgold et cofondateur du cabinet Iventus Mining, Touré est le cerveau des renégociations avec les multinationales. Sa connaissance du secteur et son nationalisme assumé en font un interlocuteur redouté, notamment par Barrick Gold, avec qui les tensions sont vives.
- Alousséni Sanou, le gardien des finances : En tant que ministre de l’Économie et des Finances, Sanou supervise les rentrées fiscales du secteur minier. Son optimisme sur la triplication des revenus reflète la fermeté du gouvernement face aux opérateurs étrangers.
- Lamine Seydou Traoré, l’ex-ministre influent : Bien qu’ayant quitté le ministère des Mines en 2023, Traoré reste un conseiller stratégique, malgré une convocation judiciaire en 2024 dans une affaire liée à Électricité du Mali.
- Zoumana Makadji, l’administrateur judiciaire : Nommé administrateur provisoire de la mine de Loulo-Gounkoto, Makadji incarne la mainmise de l’État sur les opérations de Barrick Gold, dont les bureaux à Bamako ont été fermés en avril 2025.
Leur mission est de faire plier les multinationales pour aligner leurs opérations sur le code minier de 2023.
La stratégie du président Goïta repose sur des mesures coercitives qui ont transformé les relations avec les compagnies minières. Depuis 2023, Bamako a multiplié les pressions :
- Saisies et arrestations : En janvier 2025, trois tonnes d’or ont été saisies à la mine de Loulo-Gounkoto, et quatre employés de Barrick Gold ont été détenus en septembre 2024. De même, le PDG de Resolute Mining, Terence Holohan, a été arrêté en novembre 2024, avant d’être libéré après un accord prévoyant un versement de 160 millions de dollars à l’État.
- Fermetures et nationalisations : La mine de Loulo-Gounkoto, la plus grande du pays, a été placée sous administration provisoire en mai 2025, et ses bureaux à Bamako ont été rouverts sous contrôle judiciaire. Les mines de Morila et Yatéla ont été nationalisées en juin 2025.
- Renégociations tendues : Allied Gold, B2Gold et Robex ont accepté de passer sous le nouveau code minier en septembre 2024, mais les négociations avec Barrick Gold, dirigée par Mark Bristow, restent bloquées, avec un manque à gagner estimé à 2 943 dollars l’once en janvier 2025.
Ces actions ont suscité des tensions. Cependant, des partisans du président Goïta saluent son leadership, affirmant que les recettes aurifères ont augmenté de 50 % grâce à l’expulsion de la France et à la nouvelle politique minière.
La stratégie minière du président Assimi Goïta a redéfini les rapports de force entre le Mali et les multinationales, renforçant le contrôle de l’État sur ses ressources. Les nationalisations de Morila et Yatéla, la construction d’une raffinerie d’or et des projets comme une centrale nucléaire et une usine de lithium témoignent d’une ambition de long terme. Cependant, le succès de cette politique dépendra de la capacité du gouvernement à concilier souveraineté économique, attractivité pour les investisseurs et transparence dans la gestion des revenus.
Le président Assimi Goïta, entouré de son état-major, a fait du secteur minier le fer de lance de sa politique souverainiste au Mali. En imposant un nouveau code minier et en défiant les multinationales, il cherche à maximiser les bénéfices pour le peuple malien, tout en diversifiant l’économie avec des projets ambitieux.