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Quel est l’objectif de l’Afrique à la COP28 ?

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Quel est l’objectif de l’Afrique à la COP28
À la COP28, les nations africaines aspirent à jouer un rôle équivalent dans les discussions, souvent dominées par les nations occidentales plus riches.La 28ème Conférence des Parties (COP), un événement majeur sur les changements climatiques à l’échelle mondiale, a commencé le 30 novembre dernier aux Émirats Arabes Unis. L’Afrique, confrontée à certains des effets les plus dévastateurs du réchauffement climatique, est au centre de l’attention.

La région de la Corne de l’Afrique, ayant subi une sévère sécheresse au début de l’année, fait face actuellement à des inondations. Ces conditions météorologiques extrêmes provoquent des déplacements massifs de populations, de la Somalie au Kenya.

Dans ce contexte critique, le Groupe africain des négociateurs (AGN), actuellement dirigé par la Zambie, représentera le continent lors des discussions de la COP28 à Dubaï. Malgré le fait que l’Afrique ne contribue qu’à moins de 5 % des émissions mondiales, elle subit de façon disproportionnée les conséquences néfastes des changements climatiques. Par conséquent, pour les pays africains, s’attaquer aux répercussions du changement climatique est à la fois une urgence et une question de survie.

Que demande l’Afrique à Dubaï ?

L’AGN (Groupe africain des négociateurs), sous la direction du négociateur en chef Ephraim Shitima, se concentre principalement sur deux aspects cruciaux lors de la COP28 : une transition énergétique équitable et le financement des mesures contre le changement climatique, y compris le financement pour l’adaptation.

Il existe désormais un consensus mondial sur la nécessité d’une transition des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables. Cependant, une revendication centrale des dirigeants africains est le droit du continent à une transition équitable. Les pays africains, pour la plupart des économies en développement, cherchent à maximiser temporairement leur production de combustibles fossiles pour favoriser leur industrialisation, avant de rediriger ces bénéfices vers les énergies renouvelables. Leur argument repose sur le fait que les pays développés ont bâti leur richesse en exploitant les combustibles fossiles, et que les pays africains devraient également avoir l’opportunité d’accélérer leur développement en fournissant de l’énergie à des millions de personnes sans accès à l’électricité sur le continent, notamment en exploitant le gaz naturel, considéré par certains comme moins polluant. Actuellement, plus de 600 millions d’Africains vivent sans électricité et environ 900 millions sont dépourvus de moyens de cuisson propres.

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Cette approche fait face à des résistances significatives, notamment de l’Union européenne, ainsi que de la part d’experts et d’activistes africains pour le climat. Certains soutiennent que toute exploitation de combustibles fossiles devrait être stoppée, arguant qu’il n’y a aucune preuve que les pays riches en pétrole et en gaz comme le Nigeria aient réinvesti leurs richesses pétrolières dans les énergies renouvelables ou le développement. D’autres préconisent une transition rapide vers des énergies renouvelables comme l’éolien et le solaire, craignant qu’une « ruée vers le gaz » ne laisse le continent avec des actifs indésirables.

« Les arguments des deux camps sont valables », affirme Faten Aggad, ancienne conseillère climatique de l’Union africaine (UA). Elle souligne que l’Afrique est vulnérable aux fluctuations des prix du pétrole et reconnaît que l’industrie mondiale s’oriente vers les énergies renouvelables. Aggad fait référence au mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE, qui taxera les importations en fonction de leur empreinte carbone. Cependant, elle admet que l’Afrique se trouve dans une situation délicate : « On nous vend l’idée des énergies renouvelables, mais les investissements sont minimes. Le gaz reste la seule option viable pour l’Afrique ».

Malgré ces controverses, l’AGN propose à la COP28 que les pays développés cessent leurs investissements dans les projets de combustibles fossiles d’ici 2030, permettant ainsi aux pays en développement de combler ce déficit.

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Des fonds, des fonds, des fonds

La problématique du financement climatique va regagner les projecteurs. Les pays africains réclament que les nations développées les appuient financièrement pour ériger des infrastructures résiliantes au changement climatique et pour s’ajuster à un environnement terrestre qui se réchauffe, par exemple, des infrastructures comme des barrages pour ceux confrontés à de graves enjeux liés à la montée du niveau de la mer.

Ces requêtes s’alignent avec le principe des Responsabilités communes mais différenciées (RCMD) de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), intégré dans de multiples accords et résolutions. Ce principe admet que bien que chaque pays doive gérer sa part dans la réduction des températures, certains, de par leur histoire, portent une responsabilité supérieure et devraient donc être à l’avant-garde des solutions.

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À ce jour, les flux financiers destinés à l’adaptation climatique en Afrique sont insuffisants. En 2009, les nations avancées se sont engagées à fournir 100 milliards de dollars annuellement pour le climat aux pays en voie de développement, promesse réaffirmée lors de la COP26 à Glasgow. Cependant, en 2020, seulement 83 milliards de dollars étaient effectivement récoltés chaque année. Un rapport indique que la plus grande partie de ces fonds a été allouée sous forme de prêts, souvent en dehors de l’Afrique. Parallèlement, le continent a un besoin estimé à plus de 500 milliards de dollars pour financer l’adaptation au changement climatique d’ici 2030, alors que seulement environ 11 milliards de dollars étaient accessibles en 2020.

Lutter pour la justice climatique

Les négociateurs du continent africain ont remporté des succès notables lors des récentes conférences internationales. Après une campagne acharnée qui a duré plus de trente ans et qui s’est menée en coopération avec des pays d’autres régions, ils ont réussi à obtenir la création d’un fonds dédié aux pertes et dommages lors du sommet de l’année passée en Égypte.

Durant de longues périodes, les pays industrialisés ont résisté à l’établissement de ce fonds, qui a pour but de compenser les pays en développement à faible émission pour les pertes irréparables en vies humaines, en culture et en infrastructures causées par le changement climatique, que ce soit en Afrique, en Asie ou ailleurs. L’inclusion de ce fonds dans l’accord final du sommet est considérée par beaucoup comme une avancée majeure dans le combat pour la justice climatique.

Cependant, les détails concernant la matérialisation de ces fonds restent flous, et l’origine précise des financements, ainsi que la question de savoir si les principaux pollueurs tels que la Russie et la Chine, toujours classés parmi les pays « en développement », seront tenus de contribuer, n’ont pas encore été élucidés. Un comité de transition concernant les pertes et dommages est chargé de présenter un projet de cadre à Dubaï, qui définira les modalités de contribution et les bénéficiaires du fonds.

Ce qui est en jeu?

Les pourparlers de la COP ont souvent privilégié les discours plutôt que l’action concrète, notamment de la part des pays développés qui sont censés apporter un soutien financier pour le climat et réduire drastiquement leurs émissions de carbone. Aggad, ex-conseiller de l’UA, a observé que les négociateurs africains se trouvent fréquemment dépassés par leurs homologues plus nantis. Il a été constaté que lors des négociations, les représentants des pays développés surpassent en nombre ceux venant d’Afrique ou d’Asie.

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“Le groupe de négociateurs africains (AGN) accorde trop d’importance à la COP, alors que pour les pays développés, cela fait partie d’une stratégie de diplomatie globale impliquant de multiples ministères et des pré-accords dont l’AGN n’a pas connaissance. Ainsi, quand ils arrivent à la COP, beaucoup de décisions ont déjà été prises”, a-t-elle expliqué. “L’Afrique doit repenser sa stratégie de négociation. La COP n’est qu’un événement parmi d’autres et il est crucial de promouvoir continuellement sa position sur la scène internationale.”

L’enjeu est considérable pour l’Afrique dans les négociations de la COP, surtout si les accords finaux ne tiennent pas compte des besoins spécifiques du continent. Selon un rapport du GIEC, l’Afrique se réchauffe à un rythme plus rapide que le reste du monde, et l’élévation du niveau de la mer s’y fait plus vite que la moyenne globale. De plus, les avancées concernant le changement climatique sont intrinsèquement liées aux objectifs de développement de l’Afrique.

C’est pour cette raison que les négociateurs et leaders africains se montrent plus enclins à exiger le financement et l’influence nécessaires à la COP28. Marquant leur préparation, les dirigeants africains ont organisé le premier Sommet africain sur le climat à Nairobi en août. La Déclaration de Nairobi qui en a découlé appelait les pays les plus riches à honorer leurs engagements financiers antérieurs, à modifier les régimes fiscaux qui leur sont défavorables, à diminuer les taux d’intérêt pour les emprunts des pays africains et à restructurer leur dette.

Au-delà de la revendication de leur droit d’utiliser le gaz naturel comme combustible de transition, les dirigeants africains veulent aussi positionner leurs pays comme acteurs clés des solutions climatiques, grâce aux ressources naturelles du continent et à la main-d’œuvre disponible pour développer les infrastructures des énergies renouvelables. Bien que l’Afrique possède 40 % du potentiel solaire mondial, elle compte pour moins de 1 % de la capacité installée mondiale.

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